- Retourne chez tes bipèdes, on veut pas de toi !
- Ouais, va manger ta pâtée si t'es même pas capable de chasser ne serait-ce qu'un scarabée !
- Tu deviendras jamais apprentie !

Je n'en pouvais plus. J'avais l'habitude de laisser leurs remarques glisser sur moi mais, là, c'en était trop. Ce groupe d'apprentis m'embêtait depuis mon arrivée. D'accord, personne ne connaissait mon origine, et alors ? Ce n'était pas une raison pour me faire subir ça !! J'ai fait volte-face et je suis partie en courant. J'ai glissé le long du tronc de l'arbre qui nous servait de camp et j'ai cavalé droit devant moi, sans me soucier des ronces qui éraflaient mon pelage ni des petits cailloux pointus qui me brûlaient les coussinets. Je n'ai pas entendu les voix qui me disaient de revenir. Ce n'est qu'en voyant l'énorme chat tigré que j'ai retrouvé tous mes sens -et ma peur. Il se tenait là, à un poil de souris de moi et je pouvais voir les nombreuses cicatrices de son visage.

- Qui t'a donné la permission de me déranger en pleine sieste ? gronda-t-il.

Son haleine fétide m'arriva en pleine tête et je dus planter mes griffes par terre pour ne pas chanceler.

- Je... bégayai-je lamentablement.

J'étais incapable de parler, encore moins de bouger. Je n'avais plus qu'à attendre ma mort. Au moins, je ne subirai plus d'insultes, plus de moqueries... Ce serait peut-être bien.

Le matou me bondit dessus et je résistai avec l'énergie du désespoir. Cependant, je n'étais qu'un chaton pas du tout entraîné, et, très vite, je fus blessée. Alors que je me sentais défaillir (le combat n'avait duré que 30 secondes), une femelle aussi grosse que le chat errant attaqua ce dernier. Elle était puissante et elle esquivait toutes ses attaques. J'observais le combat avec attention, de manière à me souvenir de tout ce que faisaient les combattants. Mais très vite, je m'endormis, épuisée par cette course et ce combat et malgré la douleur de mes blessures dont le sang s'échappait peu à peu. Je plongeai dans le noir et les cris du combat ne me parvinrent plus du tout. Je ne rêvai pas. Juste du noir, du silence. Un sommeil calme.

Coeur de Foudre mordit le fauve à l'épaule et le renversa. Le matou en avait assez et partit en courant. Il lui dit q'un jour, il aurait sa revanche. Coeur de Foudre était épuisée. Elle avait plusieurs blessures. Une à la patte la faisait souffrir atrocement mais il fallait qu'elle résiste à la douleur. Elle se rendit comte que Petit Echo s'était endormi. Elle se demanda ce que le chaton faisait la tout seul. Si elle n'avait pas été la , le chaton serait probablement mort à cause de cette brute de chat errant. Elle se demanda aussi pourquoi ce matou était là et elle se dit que c'était un danger pour les clans et qu'il faudrait le chasser de la forêt car il était dangereux. Elle lécha les blessures de Petit Echo. Il avait l'air d'avoir une seule blessure grave et il faudra qu'il aille voir la guérisseuse de son clan. Le chaton ouvrit les yeux.

Je sentis une chose à la fois douce et râpeuse glisser sur moi. C'était humide. Des souvenirs que je croyais perdus remontèrent à la surface.
Des corps chauds tout autour de moi. Une odeur chaude et lactée qui flottait dans l'air. Cette même langue râpeuse et mouillée qui caressait nos petits corps. Du bonheur. Le goût du lait dans ma bouche, le pelage doux de ma mère.
Mais je fus tirée de ma rêverie par un nouveau coup de langue. J'ouvris les yeux à grand peine. Là, devant moi, se tenait une chatte au pelage roux, la même que celle qui m'avait sauvée du matou. À cette pensée, je voulus bondir sur mes pattes pour m'assurer qu'il était bien parti, mais ma blessure au flanc m'en empêcha et se mit à me lancer. Je poussai un petit cri de douleur et me retrouvai étendue par terre, haletante. Je parvins tout de même à murmurer en direction de ma sauveuse :

- Le gros... (respiration) chat... Il est parti ?

Cette phrase m'avait demandé beaucoup d'efforts et je dus lutter pour ne pas me rendormir avant sa réponse. Une flaque de sang s'étendait sous moi, résultat de la blessure qui barrait mon flanc. À part ça, je n'avais qu'une égratignure à l'épaule et une autre sur la queue.

- Oui, il est parti je l'ai chassé. Petit Echo semblait complètement épuisée et cela se comprenait. Ce n'était par pour un chaton de se promener comme ça toute seule. Sa blessure saignait de plus en plus et il fallait que Coeur de Foudre trouve quelque chose pour arrêter le saignement avant qu'elle ait une hémorragie. Elle se mis donc à la recherche de toiles d'araignée , elle avait déjà entendue que cela arrêter les saignements. Comme elle n'était pas sur son territoire, elle ne savait pas se repérer. Elle espérait qu'une patrouille allait passer dans peu de temps pour l'aider mais elle ne sentait aucune odeur. Elle sortit du buisson et elle alla renifler tous les buissons aux alentours sans succès. Elle s'éloigna un peu plus et fouilla dans un buisson et victoire! Elle en trouva. Quand elle revint, le chaton était toujours endormie. Elle appliqua les toiles d'araignées en essayant de ne pas faire trop souffrir Petit Echo.

Je suis désolée je pensais que tu était un mâle et je t'ai lu mais j'ai juste oublié de répondre à ta question.

Je me rendormis aussi sec. Encore une fois, je ne fis aucun rêve. Lorsque je me réveillai, ce fut en sentant une substance étrange sur mon flanc blessé. La douleur était toujours aussi vive, mais le sang s'était arrêté de couler. Je ressentis une profonde gratitude à l'égard de ma sauveuse, sans qui je serai morte à l'heure qu'il est. J'avais beau être parfois très malheureuse, je ne voulais pas mourir. Je levai les yeux vers la femelle rousse et je miaulai :

- Merci beaucoup de m'avoir sauvée ! Je ne veux pas mourir...

J'étais assez énervée contre moi-même. Je ne savais pas pourquoi j'avais foncé à l'aveuglette à travers la forêt, sans faire attention à mon environnement. Je me promis de ne plus laisser la colère et le chagrin m'envahir à ce point.

Cœur de Foudre était peinée pour le chaton. Elle semblait s'en vouloir d'être sortie de son camps.
-Ne t'inquiète pas tu ne vas pas mourir. Tu es en sécurité et saine et sauve. Je vais te ramener à ton camps.
Cœur de Foudre avait appliqué la toile d'araignée sur la blessure et le saignement s'était arrêté. Le chaton semblait épuisé mais cela n'étonnait pas Cœur de Foudre car un chaton ne peut pas supporter une journée comme celle-ci. Elle lui dit qu'il fallait qu'elle se lève pour qu'elle puisse la ramener à son camps. Elle avait espérer pendant tout ce temps qu'une patrouille passe mais rien. Ses blessures lui faisaient mal mais elle essayait de ne pas y penser.

Ma sauveuse murmura :

-Ne t'inquiète pas tu ne vas pas mourir. Tu es en sécurité et saine et sauve. Je vais te ramener à ton camp.
-Merci grande guerrière, répondis-je. Tu es très gentille.

Les toiles d'araignées, cette substance étrange que j'avais sentie, semblaient faire effet. J'essayais tant bien que mal de me lever, mais ma blessure m'arracha un cri de douleur et je retombai. Je réessayais environ cinq fois avant de tenir debout. J'étais épuisée et blessée, mais je n'aurais pas la honte d'entrer dans le camp en étant portée par une guerrière d'un autre clan... D'un autre clan ?! Je n'y avais pas pensé ! Elle n'avait sûrement pas le droit de me ramener au camp ! Je décidai de lui faire part de mes inquiétudes. De plus, cela me permettrait de la connaître un peu mieux.

- Tu n'es pas du Clan du Ciel, tu n'as pas le droit de venir dans mon camp ! lui dis-je, un peu inquiète. Si mon chef te chassait ? Elle pourrait te blesser encore plus que tu ne l'es déjà !

Je sentais que ça ne se passerait pas bien, et c'était entièrement de ma faute.

- Tu n'as pas à m'aider, tout est de ma faute, ajoutai-je, la tête basse. Je rentrerai toute seule, ça vaut mieux pour toi.

UP !

-Je ne te laisserai jamais rentrer à ton camp toute seule! Et puis cela arrive à tous les chatons de faire des bêtises et de vouloir sortir du camp. J'expliquerai tout à ta chef et elle ne va pas me blesser puisque je t'ai sauvée.

Je me sentis rassurée. Étoile Parfumée n'était pas méchante, elle ne ferait pas de mal à ma nouvelle amie. Elle la remercierait même pour m'avoir sauvée. Je répondis, sûre de moi :

- Merci de me raccompagner. D'ailleurs, tu as raison. Étoile Parfumée est gentille. Elle te laissera peut-être te reposer au camp, d'ailleurs. Tu es blessée.

En effet, la guerrière semblait souffrir de ses blessures. J'espérais que cela ne l'empêcherait pas de me raccompagner. Rien ne l'y obligeait, et pourtant elle venait avec moi. Les guerriers des autres clans étaient donc gentils et désireux de protéger les plus faibles, comme ceux du Clan du Ciel.

-Si tu veux savoir qui je suis, je suis une guerrière du Clan du Tonnerre. Tu viens? On va rentrer chez toi. Je t'aiderai si tu as du mal à avancer.

- Du Clan du Tonnerre ? Whaou ! Tu es la première que je vois ! Et puis, ne t'en fais pas, je marcherai toute seule.

Mais, à peine j'avais fait cinq pas pour la rejoindre que je poussais un petit cri de douleur. Ma blessure au flanc me lançait.

-Qu'est ce qui ne va pas?
- R...rien, parvins-je à souffler.

Bien entendu, la guerrière n'en crut pas un mot. Elle miaula :

-Viens marcher près de moi, ce n'est pas prudent de marcher toute seule. Viens t'appuyer contre moi.

Elle revint vers moi et, ravalant ma fierté, je m'appuyai sur elle.

-Tu t'entends bien avec tes camarades dans le Clan du Ciel ? Ils sont gentils avec toi? Moi je m'entends très bien avec ma guérisseuse et parfois je l'aide à ramasser des remèdes. As-tu des frères et soeurs? Moi je n'en ai plus, lors de ma naissance, on était deux. Il y avait ma sœur et moi. Mais ma sœur est morte dès qu'elle est née. J'étais très triste. J'aurai voulu qu'on devienne apprenties ensemble et que l'on fasse notre veillée de guerrières ensemble mais le Clan des Etoiles n'en a pas décidé ainsi. Maintenant je sais qu'elle est dans les rangs des guerriers de jadis et qu'elle veille sur moi.

Le fait qu'elle parle aussi longtemps m'arrangeait bien, au fond. Cela me permettrait de lui faire croire que je n'avais pas entendu le début de son discours. Je n'avais aucune envie de m'attarder avec une ennemie (qui chose étonnante, était devenue mon amie) sur le fait que mes camarades se moquaient de moi à cause de mes origines inconnues. Je répondis :

- Je suis désolée pour toi... Mais je suis sûre comme toi que ta sœur veille sur toi depuis le Clan des Étoiles. Moi, je suis fille unique.

Un instant, j'avais failli ajouter que je n'avais pas de famille. Je m'étais retenue. Les autres clans n'avaient pas besoin de le savoir. C'était ma vie privée.